En 1879 est organisé un concours par la Préfecture de la Seine pour rendre hommage aux victimes militaires et civiles de la guerre de 1870 et du siège de Paris. Le rond-point de Courbevoie est choisi comme emplacement : les gardes nationaux s’y sont rassemblés le 19 janvier 1871 pour la seconde bataille de Buzenval. Ce concours est aussi l’occasion de replacer la capitale dans l’histoire nationale dont elle s’est séparée depuis la Commune de Paris. Il est prévu que cette nouvelle statue soit posée sur le socle vide où se trouvait auparavant une statue de Napoléon Ier, enlevée en 1870. Le concours attire une centaine d’artistes.
Louis-Ernest Barrias (1841-1905) est finalement choisi comme finaliste. Sa composition pourrait s’inspirer du Monument au maréchal Moncey, du sculpteur Amédée Doublemard.
La statue de Barrias La Défense de Paris est en bronze. Elle mesure près de 4 mètres de haut et est installée sur le socle vide de 7 mètres où est inscrit « Défense de Paris 1870-1871 »[1]. Le socle est entouré de bornes et de chaînes. Une partie des chaînes est aujourd’hui conservée dans les réserves de la ville de Puteaux, et une partie des bornes se trouve dans le parc Offenbach.
Le groupe est composé de trois figures. Une femme est debout, appuyée sur un canon, dans une tenue de garde national. Elle tient dans sa main droite un sabre et dans sa main gauche un drapeau. C’est l’allégorie de la ville de Paris. A côté d’elle, affaissé, se trouve un jeune soldat. Il est en train de réarmer son fusil. Ces deux figures sont tournées vers Buzenval, vers la dernière bataille. Derrière elle, est assise une fillette, les bras croisés sur sa poitrine et le visage baissé. Elle symbolise la population, les victimes du siège et leurs souffrances. Elle est tournée vers Paris.
L’inauguration de la statue de Barrias au rond-point de Courbevoie a lieu le 12 août 1883. Le gouvernement est représenté par Waldeck Rousseau, ministre de l’Intérieur. La cérémonie attire beaucoup de monde. Elle commence par 21 coups de canon tirés au Mont-Valérien à quatre heures de l’après-midi [2]. La garde républicaine joue La Marseillaise et les voiles qui recouvrent la statue sont enlevés. Le président du conseil général de la Seine, M. Forest, prononce ensuite un discours sur la guerre de 1870 et la défense de la ville de Paris [3]. La cérémonie se conclue sur un défilé militaire avec dans l’ordre le 17e bataillon de chasseurs à pied, les 45e et 5e régiments de ligne, les pompiers et le 8e régiment de dragons [4], puis un défilé de sociétés et corporations ouvrières.
Plusieurs ancien-nes Fédéré-es ou partisan-es se mêlent à la foule pour commémorer la Commune de Paris et déploient le drapeau rouge. En effet, le rond-point de Courbevoie est aussi le lieu d’affrontements entre Paris et Versailles le 2 avril 1871. Le souvenir de la lutte parisienne est encore très présent dans les mémoires.
Le rond-point de Courbevoie, par délibération du conseil municipal de Puteaux [5], est renommé rond-point de La Défense de Paris. Il donne ensuite son nom au quartier.
Le quartier de La Défense est réaménagé à partir des années 1950. La statue est alors déplacée derrière le CNIT (Centre des nouvelles industries et technologies) pour ne pas gêner les travaux. Une vingtaine d’années plus tard, elle est repositionnée à son emplacement premier sur un nouveau socle. Une cérémonie est donnée le 21 septembre 1983, pour fêter la réinstallation de la statue et son centenaire. Enfin, en janvier 2017, La Défense de Paris est déplacée de quelques mètres afin d’être plus visible par le public.
[1] La Liberté, 14/08/1883.
[2] Le Rappel, 14/08/1883.
[3] Pour lire le discours en entier, voir le reportage du journal La Liberté, du 14/08/1883, sur Gallica (lien d’accès).
[4] La Liberté, 14/08/1883.
[5] Délibération du conseil municipal de Puteaux du 04/08/1883, AMP, 1D1/13.